dimanche 24 juin 2007

En Créolie (II) : la facture du ka, bonne question

Le ka a bien changé. Quand je l’ai connu, c’était un tonneau avec une peau de cabri et un fort métrage de corde de chanvre. Aujourd’hui, on en voit souvent en forme de djembé, surtout pour pouvoir jouer debout. Et puis des tambours au bois presque lisse : les lattes de bois sont collées, désormais, et le cerclage de bois n’est plus forcé au rouge, mais enroulé, cloué à la jonction du ruban puis vissé (on sent la visseuse Bosch). Et la corde est synthétique, évidemment. On ne voit plus guère non plus de ka peints de couleurs vives : le bois se doit d'être nu, dans une idée de couleur naturelle.
Son énorme des tambours de Takouta, ainsi, d’une puissance de mythe et de météorologie, la peau sonnant fort dès qu’on l’effleure. Facture contemporaine, donc, Michel Halley disant que ceux d’avant étaient « de la récupération ». Certes. On est loin d’une démarche baroqueuse, loin d’une pratique de facture constante. Pourtant, çà et là, on entend une revendication constante et obstinée de fidélité aux racines et à la vérité de la musique.
Mais je me souviens aussi d’une conversation avec Shubhendra Rao, à New Delhi, sur le calvaire du joueur de sitar avec son instrument anti-ergonomique au possible et dont l’accordage est d’une fiabilité qui ne dépasse pas quelques dizaines de minutes. En Inde, nous sommes dans une civilisation opiniâtrement conservatrice. Ici, nous sommes dans un monde du recommencé, du refait, du réparé, du bricolé. Je ne peux m’empêcher d’avoir la nostalgie des tambours-tonneaux, de la ficelle râpée du bourrelet autour de la peau. Mais Halley a peut-être raison.

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