lundi 8 février 2010

Willie Nelson, ou comment se tromper d’Amérique

Comment une star se plante-t-elle ? Comment un symbole peut-il se mettre hors sujet ? Il sort ses jours-ci un nouvel album de standards par Willie Nelson, American Classic, qui illustre combien on peut être américain, classique et pourtant à côté du propos. Déjà, il y a quelques temps, il avait enregistré Two Men With the Blues avec Wynton Marsalis – deux immenses personnalités, deux immenses talents, deux incontestables trajectoires américaines et quel plat, quel crash, quel effondrement… Et une belle erreur dans le titre : non, Willie Nelson peut exprimer mille sentiments, mille états d’âme, mille situations, mais certainement pas le blues.
Avec American Classic, même déception. Il y a Joe Sample, Christian McBride et Lewis Nash à la rythmique sur une bonne partie des titres, et pourtant tout ce qui devrait swinguer est amolli, dénervé, amorti. The Nearness of You, Come Rain or Come Shine, Ain’t Misbehaving, tout ce qui devrait s’insérer dans une tradition de doigts qui claquent et de mesure bien marquée se retrouve curieusement moelleux, rectiligne, éclairé a giorno. Pourtant, Willie Nelson a souvent su poivrer ses disques, leur donner une âpreté et un rugueux qui disaient la vraie vie, les sentiments forts, la rudesse du destin – l’Amérique, quoi.
Curieuse leçon : personne n’est un génie partout ; il existe parfois des frontières de genre, et qui comptent vraiment. Et, quand on parle de l’Amérique, il faut donc croire qu’il n’y a pas une seule Amérique…

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