lundi 14 mai 2007

Bastien Lucas et la question du classique

Conversation tout à l’heure avec Bastien Lucas, prix Claude-Lemesle 2006 et protégé de Gabriel Yacoub (on peut être l’un et l’autre, c’est rassurant !). Vingt-six ans, professeur de musique et toujours étudiant au Conservatoire de Paris, il a sorti Essai, disque incroyablement abouti malgré son titre. Quelque chose de roide et d’envolé à la fois, une poésie fulgurante et étale, des mélodies d’une simplicité parfaite et pourtant curieusement sophistiquées. Il lâche qu’il a longtemps « pensé que Mozart n’existait que pour apprendre le piano ». Sa découverte du domaine classique, en arrivant en faculté de musique, a été le choc de sa vie, quelques années après une enfance tout entière partagée entre Francis Cabrel et Méthode Rose.
Son histoire fait écho à la conversion de Bertrand Belin à Mendelssohn et Debussy pour La Perdue (de la guitare électrique au violon, du riff à la partition), son histoire fait écho à D’un siècle à l’autre, superbe aventure d’Emily Loizeau, Helena Noguerra, Daphné et une huitaine de voix de la pop française actuelle dans des mélodies de Fauré, Duparc, Reynaldo Hahn, Chausson, Satie et Debussy (il faut vraiment écouter ça, j'en ai notamment parlé dans Le Figaro), son histoire fait écho au vieux fantasme de Jean-Louis Murat d’enregistrer du Fauré… Son histoire est celle de la réconciliation de la musique classique et de la chanson populaire, à moins qu’il n’y ait jamais eu de rupture, mais une sorte d’histoire secrète qui lierait les compositeurs du XIXe à Jacques Brel ou au Michel Fugain des débuts. Bastien Lucas, étudiant en contrepoint et harmonie au Conservatoire national supérieur de musique de Paris, ajoute à cette généalogie Art Mengo ou Laurent Voulzy, mélodistes nourris des couleurs du jazz et des grâces classiques françaises. Une lignée longue et riche, donc, mais que de réponses récentes à cette vieille question du classique. Le retour du lettré dans la culture populaire ?

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