« Chorus » va-t-il mourir ?
On le craint, on le redoute et puis ça finit par arriver. Voici que Chorus n’est pas loin de passer. Le nouveau numéro 61 parait ces jours-ci avec une pagination réduite de moitié et il n’est pas sûr qu’il y aura un numéro 62.
Ça me fait penser à une conversation pittoresque que j’ai eue il y a quelques temps avec une attachée de presse indépendante. Nous évoquions les difficultés de la presse quotidienne et elle m’a fait entendre un joli hymne à Libération, son importance majeure dans le paysage culturel, sa présence indispensable à l’existence de la démocratie, sa fonction de miroir fidèle des évolutions culturelles… Mais, quant à elle, elle le feuillette chez son marchand de journaux et elle sort les articles de liberation.fr pour ses revues de presse – « c’est devenu tellement cher, les journaux ». Non, chère amie, les journaux quotidiens ne sont pas chers ; quand on en achète un, on paye à peu près 15 ou 20% de son prix. Mais on pleurera beaucoup quand Libé sera mort.
Et voilà donc, peut-être, le tour de Chorus. Je n’ai pas souvent entendu un artiste dire que Chorus est de la mauvaise presse. Ah, tout le monde n’est pas d’accord, tout le monde n’apprécie pas tout. Mais tout le monde le juge indispensable. Je me souviens de mon interview pour Chorus avec Dominique A. Ce n’était pas la médaille des Arts et des lettres ou le disque d’or, mais il était ravi. Ravi d’entrer dans ce temple de la chanson classique, dans ce lieu qui vit sous l’ombre des plus grands maîtres. Je ne veux pas être indiscret, mais il était plus heureux que l’on parle de L’Horizon dans Chorus que l’on s’attarde sur le même disque dans certain journal prétendument son allié.
Je ne connais personne, chez les tourneurs, les agents d’artistes, les attachés de presse ou les labels, qui n’aie une histoire à raconter sur le portrait d’une page dans Chorus pour un débutant, ou la petite cérémonie que constitue forcément le moment où on appelle l’artiste pour lui dire « et puis tu sais il y a Chorus qui voudrait faire son dossier sur toi, avec la couverture ».
Evidemment, il y a toujours des choix que l’on n’aime pas, ces dizaines de pages de chroniques de disques sans aucun flingage (ben oui, chacun de nous, à Chorus, écrit sur des albums qu’il a envie de défendre, donc qu’il aime), ces gloires du moment posées au même niveau que des artistes qui ont déjà vécu une longue vie de musique sans jamais accrocher le soleil… Je ne suis pas le seul à parler de Chorus comme du Journal officiel de la chanson.
Mais donc Chorus pourrait bien mourir parce beaucoup de ceux qui aiment Chorus ne l’achètent jamais, parce que tant de ceux qui pensent que Chorus est indispensable ne se sont jamais abonnés, parce que tant de décideurs qui jurent que Chorus est indispensable à un plan média n’y ont jamais pris une page de publicité. Pour connaitre un peu la situation de Chorus (j’y écris depuis cinq ans, quand même), ce que je trouve le plus agaçant est que cette revue risque de mourir pour pas grand-chose : dix pages de publicité par numéro, deux mille abonnés… Cela ne demanderait pas beaucoup de décisions de la part de beaucoup de gens. (Il y a un lien dans la colonne de gauche, vous pouvez y aller.)
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