Viktor Lazlo, le cabaret et la sortie du cabaret
Viktor Lazlo aussi, hier soir. Le New Morning lui va bien, avec son plafond bas et son climat jazz. C’est une chanteuse de cabaret, à la fois jazz, légèrement tropicale et sobrement chanson. Il y a toujours un peu de biguine dans ses ballades, un peu de romantisme dans ses danses. C’est une femme intemporelle, aussi à l’aise dans Piaf que chez ses exacts contemporains. Le fond du répertoire est atlantique, occidental, toujours multi-référencé. Billie Holiday, Tom Waits, l’Amérique Latine, Léo Marjane, les années 80 : son affaire est toujours de belle santé même dans ses fragilités, éclatante même dans la déploration. Une manière d’embrasser d’un coup tout le spectre, à la fois comme un autoportrait de créole hors-sol et comme un œcuménisme de jazz-club.
Il y a pourtant des ruptures, qui étaient en germe dans son dernier disque, Begin the Biguine. Quand elle prend I Am So Lonesome I Could Cry de Hank Williams, avec juste la guitare électrique, on sent l’espace autour d’elle, on sent à quel point elle est capable de sculpter dans le vide – et combien c’est finalement le plus grand talent de sa voix si prompte aux confidences. Dans cette chanson, elle fait penser à cet album radieux de Petra Haden avec Bill Frisell (sorti en 2005, le disque post-rock le plus exemplairement aéré que j’aie entendu). Et elle fait suivre ça des Mots d’amour (Charles Dumont-Michel Rivgauche) sur laquelle elle fait glisser la brise de petites phrases de violon créole. Ces deux titres-là étaient à la fois le sommet et la porte de sortie de son art – somme toute assez classique – du cabaret jazz. Pour paraphraser, on dira que cela s’appelle l’envol.
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