mercredi 28 novembre 2007

Au pays de Noël (III) : le chef d’œuvre de Leon Redbone

La puissance de l’album Christmas Island de Leon Redbone tient à sans doute plus à son assomption des lieux communs qu’à la volonté d’y échapper. Au contraire, il y a partout la référence à un âge d’or à la fois bien connu et plaisamment détourné. Le dobro de Cindy Cashdollar comme souvent dans ses albums des années 80, mais avec les omniprésents violons de Noël ; le piano un peu stride, mais joué par Dr John… L’ancienneté du répertoire (sa vétusté, même) n’est pas seulement la signature d’un esthète des temps du 78 tours, mais éclaire finalement un certain rapport aux fêtes de fin d’année, par essence nostalgiques et désuètes. Vu de France, il est d’ailleurs peu de disques américains de Noël qui parlent aussi sincère et avec autant de noblesse du sentiment tout simple (enfantin, même), qui consiste à attendre les cadeaux et à sourire devant les décorations de la maison. C’est un peu le pendant du générique de Manhattan de Woody Allen, un discours voisin de celui d’Ingmar Bergman lorsqu’il peint le réveillon au début de Fanny et Alexandre : une idée des Noëls passés, à la beauté sans nuance et au prestige intact. En idéalisant la chanson de Noël, Leon Redbone idéalise Noël autant que l’Amérique des musiques populaires. Un chef d’œuvre armé de toutes les ruses et de toutes les techniques du second degré, mais qui célèbre Noël de manière parfaitement littérale.

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