lundi 19 novembre 2007

Pierre Henry toujours, encore, toujours

Depuis le 33 tours de Futuristie acheté, je crois, à 15 francs dans les soldes d’un marchand de disques à l’angle de la rue Nozières et de la rue de l’Abbé Grégoire, à Pointe-à-Pitre, je n’ai jamais vraiment cessé de fréquenter Pierre Henry. Au point que je me suis plus souvent senti dépaysé par les variétés que par son univers sonore qui se refuse à la note.
Voici le coffret 8.0 : six pièces inédites dont quatre de cette année. On peut lui reprocher, si l’on est maniaquement janséniste, de puiser encore dans le fond des Jerks électroniques (notamment Cœur, remix de Psyché Rock qui se termine en tuerie à danser), mais peu importe. Ce qui me fascine le plus, c’est la précision de son vocabulaire sonore et, finalement, sa prolixité avec un matériau aussi ténu. Le grincement de porte, la chaîne trainant sur le sol, le frottement d’un métal sur de l’inox (une fourchette dans un plat ?), des soupirs, des échos de souffle, des sirènes de tous les tons, des parties du son d’explosions ou de tintements de cloche, des craquements de feu, des chocs directement sur la tête de lecture du magnétophone, des sifflements électroniques, des passages d’avion ou de moto, des brouhahas de foule…
Histoire naturelle ou les roues de la Terre est évidemment le plus limpide – presque naturaliste, même, avec son parcours dans les sonorités « typiques » les plus identifiables du monde – mais j’avoue beaucoup d’attirance pour les humeurs de vieille mécanique d’Utopia. On y entend tant de sons qui durent compter dans la vie sensible du vieux monsieur, des ressorts et des soupapes, des sirènes et des bruits d’orchestre, des sifflets et des rires… Les créations de Pierre Henry sont ainsi, comme des retrouvailles avec la bassine à confitures en cuivre ou avec la vieille clé de la serrure rouillée du jardin : tout fonctionne parfaitement, avec autant d’évidences que de heurts, autant d’abandon que d’inconfort. Mais un petit parfum de bel hier, une sensation de fin d’été.

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