mardi 13 novembre 2007

Serge Hureau, au bout ultime de la chanson

La recherche des états limites de la chanson n’a aucune raison de s’interrompre et se trouve toujours des directions nouvelles. Le nouvel album de Serge Hureau et de ses amis, par exemple : il y a dans Jardin des métamorphoses toutes sortes d’objets musicaux qui sont à la fois dans la chanson et en dehors. Une petite compilation d’adaptations de Green de Verlaine, par exemple : les compositions de Léo Ferré, Reynaldo Hahn et Gabriel Fauré sur le même poème comme pour déplier les possibles d’une seule rêverie. Et toutes sortes de manières, de textures, d’origines, du oud et de la voix baroque, de la mélodie contemporaine et de la chanson pour enfants, du Voltaire et de l’italien, des intentions très comédiennes et le bel canto le plus abstrait…
Depuis longtemps Hureau navigue au bout de la chanson – des Piaf dits, des Trenet mis en scène dans leur extrême noirceur, un spectacle de chansons par des sourds-muets, des recherches sur le poids politique des répertoires… Sa trajectoire finit par dessiner un territoire vaste comme la géographie arbitraire et merveilleuse des Villes invisibles d’Italo Calvino, comme la science des animaux extravagants des bestiaires médiévaux. Il atteint le centre de cet art par le voyage à travers toutes ses périphéries, d’un Aznavour chanté à l’orientale à une lecture joyeusement archaïsante de l’opérette Ciboulette. Il est peu de plaisirs aussi lettrés, peu de délires aussi civilisés.

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