Christophe Willem et les questions du spé-popu
Conversation avec Christophe Willem, qui est tout autant jeune chanteur que toujours étudiant en communication. Nous évoquons son admiration pour Zazie et surtout la manière dont elle a su être à la fois une auteure et une musicienne d’une exigence très pointue, et conquérir un public de Bercy. « Spé et popu », note-t-il. Discussion, donc, sur cette posture spé-popu dans laquelle on trouve évidemment Björk, à laquelle il ajoute Massive Attack. Une posture dont il rêve explicitement, à laquelle il ose croire franchement pour lui-même (c’est appréciable, cette ambition qui ne se cache pas, cette manière d’assumer cash le chemin déjà parcouru).
Il est vrai que c’est certainement une des plus novatrices singularités de notre moment culturel : la facilité du plus large public à céder à des propositions réellement novatrices. Ce n’est pas très, très neuf, puisque Debut de Björk est sorti en 1993 et a aussitôt été une réussite commerciale. Mais ces quinze années ont vu beaucoup de formes audacieuses dépasser le disque de platine. Même si on peut considérer – pour peu que l’on ait plus de quarante ans – la musique de Daft Punk comme une redite mollassonne du dancefloor fin 70’s, elle vient de l’underground. On peut objecter que tous ces gens ont suffisamment de succès pour qu’on croie leur musique cousue de fil blanc, pour qu’on juge que leur réussite est le fruit d’énormes dépenses de marketing. Il reste que leur trajectoire est imprévisible, sinon dans son explosion initiale, du moins dans la dimension historique qu’elle a prise.
Pour employer le vilain adjectif séminal, il est évident que cette capacité à susciter une suite, une descendance artistique, des conséquences culturelles est tout aussi flagrante chez un Jean-Louis Murat (grand bougoniste, il me disait l’autre jour : « moi, je remplis à peine une Cigale, à Paris ») ou un Dominique A (plus conscient de son importance parce qu’elle lui est venue plus tôt dans sa vie, je crois) que pour une Zazie. Simplement, on mettra plus de pudeur à reconnaitre son amour de Zazie que l’influence des deux susdits (ou de Bashung, ou de Miossec) puisqu’elle est un gros compte Universal. Je me souviens de Thomas Fersen (en 2003, il est vrai, avant la sortie de Rodéo) parlant de familles d’artistes : il appariait la Tordue et les Têtes Raides, Zazie et Obispo. Voilà l’ambiguïté du spé-popu, toujours un peu suspect en raison de ses fréquentations ou de même de ses conditions d’exercice (Massive Attack « dilué » dans Bercy, ai-je lu une fois). Une posture riche, évidemment, mais pas forcément enviée.
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