Magma, à la biblique
Magma a toujours tenu du prodige. Quelque chose de mystique, évidemment, mais aussi une sorte de météorologie, de tectonique, de magie médiévale. Christian Vander n’a d’ailleurs jamais cherché à éviter les rapprochements entre sa musique et l’idée que l’on peut se faire de la liturgie (une liturgie sans véritable dogme, d’ailleurs, une liturgie strictement narrative et presque a-théologique) en truffant ses compositions de psalmodies ou même de déclamations d’essence religieuse. Voici qu’arrive Mythes et légendes, volume IV, DVD enregistré en public en 2005 pendant une série de concerts rétrospectifs. Et, justement, on y trouve l’impressionnant Zëss, grosse demi-heure de récit à la biblique. Puissance qui semble parfois annoncer le black metal (« le chaos des apocalypses où tout retourne au néant », ce genre-là) mais qui est tout à fait raccord avec la génération de Vander, ou tout au moins avec certaines années 60-70 : les mythologies de Druillet, le millénarisme d’Auclair dans Simon du Fleuve (à son propos, une page assez détaillée, mais qui n’ouvre pas le dossier de la contagion vert-brun, dont Auclair fut peut-être, à son corps défendant, un idéologue), peut-être tout aussi directement que John Coltrane lui-même. Ou, dans un autre siècle, les Ecritures démentes du Livre de Mormon, sorte de Bible fantaisie qui annonce Tolkien.
C’est peut-être cela qui fait de la musique de Magma une des musiques les moins abstraites de ce vaste arc des rock et des jazz cherchant à se libérer de la narration ou de la figuration. Une musique sidérante, évidemment, avec son sérieux, sa pompe, son folklore scénique, même. Mais, encore une fois, il y a là des intentions si évidemment démonstratives, si évidemment tendues vers le partage d’une rêverie. Comme si, pour son voyage vers Kobaïa, Vander avait besoin d’être accompagné.
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