Rodolphe Burger et ses retrouvailles avec EMI
Conversation avec Rodolphe Burger l’autre jour, à propos de son nouvel album, No Sport (une fois encore, une puissance, une inspiration, une ferveur exemplaires). Nous en arrivons à ce paradoxe qu’il y a quelques années il s’est fait jeter à la rue, avec Kat Onoma, par EMI. Compression de personnel, compression des artistes, parce qu’il fallait rassurer les actionnaires avec un beau plan social.
Il maintient que ça a été une chance : il a pu fonder Dernière Bande, label sur lequel il a réédité Kat Onoma et sorti toute une tralée de projets personnels. Une image exemplaire de la liberté artistique telle qu’on peut la rêver : des initiatives, des audaces, une inépuisable générosité.
Et voici Rodolphe Burger de retour chez EMI avec No Sport, alors que la maison de disques navigue à vue, toujours entre deux plans sociaux. Il n’y voit d’ironie particulière : le nouveau modèle économique de la musique populaire est un champ de bataille que chacun sillonne en tous sens en rêvant d’un abri. Il avait besoin d’un peu de temps d’écriture et de studio pour son aventure en solo et les conditions ont bien changé pour EMI. Indépendamment de la question d’hommes (il n’y a plus guère là-bas de décideurs qui ont décidé de son éviction), le poids mort de chaque album s’est abaissé, le seuil de rentabilité et les ambitions commerciales se sont tout autant abaissées. Trop petit pour rester au catalogue vers 2002, il est maintenant éligible, tant on sait que les artistes « spé » ont mieux résisté à la crise. Mais il précise aussi qu’il a appris « à ne pas formuler des désirs artistiques détachés des paramètres de budget » – l’expérience du patron de label indépendant…
Le phénomène est intéressant : dans une économie sinistrée, la convergence des réalismes. Ce qui est étonnant – et heureux –, c’est la force et la liberté du disque né des retrouvailles de Burger et d’EMI.
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