mardi 15 avril 2008

Printemps de Bourges (I) : pourquoi Rose, pourquoi Renan Luce

Premier concert de ce Printemps de Bourges : Rose, sous le grand chapiteau. Des cris, des acclamations, une évidente popularité. Nous sommes quelques confrères qui nous regardons. On ne comprend pas, en fait. Il y a le pouvoir de La Liste, évidemment, mais cela fait-il un vrai univers, une grâce, une chaleur ? On peut expliquer par les couleurs années 70 des mélodies, parfois un peu Véronique Sanson, un peu America. Mutatis mutandis, on pense un peu à la manière dont Nicole Croisille était impliquée dans son chant à l’époque de ses grands tubes : un peu dedans, un peu dehors, un peu de travers et un peu banale à la fois. Ne préjugeons pas : il se pourrait qu’elle dure, qu’elle profite de cette gloire-là pour installer enfin une écriture plus riche, moins adolescente que sur son premier album.
La destinée de Renan Luce, qui la suit au Phénix, pourrait apparaitre comme l’exact inverse : on comprend tout. Il a ce talent instinctif de connaitre le public, de se conduire sur scène, déjà, comme un vieux roublard (une sorte d’Aznavour express, avec une évidente parenté bénabarienne dans ses petits discours entre les chansons). Et puis la façon dont il varie les approches et les angles de ses chansons. On n’aurait pas imaginé, par exemple, qu’il mène le rock’n’roll aussi facilement que ce qu’il accomplit dans Chien mouillé. Et il sait être autre chose que révérencieux dans l’exercice Brassens (Je suis un voyou en rythmique re-binarisée, assez loin de la version géniale de Renaud mais d’une efficacité émotionnelle et romanesque terrassante). La trajectoire en deux ans est phénoménale, évidemment, avec cette manière si attendrissante d’être simple.
On a beaucoup dit (et moi-même, et lui-même) combien il peut tout devoir à Brassens et Fersen. Mais il y a aussi dans son écriture une couleur singulière – ou plutôt très accessible, au contraire. On voit très bien ce que Fersen aurait fait de Nuit blanche : l’ange du bizarre serait passé par là et aurait ajouté des mots rares. Renan Luce a tout écrit avec le Bled, ce qui est au moins aussi génial, et évidemment plus rapide à atteindre le grand public.

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